On m’a posé plein de questions quand j’ai commencé à masser. “Ça ne te dégoûte pas de toucher des inconnues ?” ou “ça ne te dérange pas de les recevoir chez toi ?”, “t’es sûre que tu tiendras le coup physiquement ?”. Ces inquiétudes n’avaient pas frôlé mon esprit. Pour moi, la question la plus redoutable allait aussi être la plus récurrente : Tu fais quoi dans la vie ?
Masseuse, ça ne me (res)semblait pas assez. En déménageant à Paris et en devenant étudiante, j’avais changé de ville, de milieu, de classe sociale même. En changeant de carrière, c'était mon identité qui allait être bousculée. Et parce que ma formation au drainage lymphatique fut plutôt courte (comparée aux cinq années d’études que je venais de conclure), ce n’était pas assez. Assez quoi vous vous demandez ? Et bien, intelligent, valorisant, cool ? Un mélange de tout ça. En tous cas, ce n’était pas suffisant pour que je me sente validée socialement. Il va s’en dire que personne ne m’a fait ressentir un fragment de tout ça, hein. Ceci est la petite histoire que je me suis honteusement racontée, bien nichée entre mes peurs et mon immaturité.
La situation se présentait le plus fréquemment lors de ces fêtes où vous ne connaissez qu’une personne. Ou pire, celles ou vous n’avez pas croisé les invités depuis plusieurs années. Et toi, tu fais quoi maintenant ? Au tout début, j’ai voulu la jouer fine. J’argumentais sur la bêtise d’une question si large, qui n’attend pourtant comme réponse qu’un intitulé de poste. Évidemment, ça rendait ma profession intrigante, puisque je ne l’avais pas révélée, et ce n’était pas si finement joué.
Après ça, je nuançais. “Je suis journaliste culture…”, et je glissais, “oh et je suis formée au drainage lymphatique depuis peu”. Pratique : j’entretenais mon égo avec un métier qui sonnait mieux à mon goût, sans totalement trahir la réalité de mon quotidien, ni prononcer le mot “masseuse”. Moins pratique : les gros yeux de la personne en face, qui n’avait jamais entendu parler de lymphe, et que je finissais par bassiner avec ma vulgarisation du système lymphatique.
Assez vite, c’est devenu absurde de me présenter comme journaliste tant les piges étaient une partie infime de mon travail. J’ai pris mon courage à deux mains, et, j’ai fini par dire la vérité. Que je le veuille ou non, je n’avais pas seulement changé de profession. J’avais évolué et mon quotidien, mon ambition et mes envies aussi. Il était donc temps de l’assumer, et de réapprendre à me présenter.
Et, ça a été. Ou presque.
Il y a deux sortes de réactions quand on s’annonce masseuse. La première est chouette : mon interlocuteur.trice s’enthousiasme d’entendre parler d’un job si “concret”, et pose tout un tas de questions qui ont souvent le mérite de nous mener à une vraie conversation.
Quant à l’autre réaction, elle a failli me faire adopter une nouvelle ruse face au tu-fais-quoi-dans-la-vie. Laquelle ? Directement inspirée d’une de mes meilleures amies qui le fait dès qu’elle en a l’occasion, il suffit de s’inventer un job et de tenir son rôle aussi longtemps que possible. En plus du potentiel comique, ça m’évitait de devoir répondre aux hommes qui spontanément, lorsqu’ils apprennent que je suis masseuse, me réclament un massage. Il faudrait que je fasse des stat’, mais je dirais qu’au moins un mec sur cinq me fait le coup. Et non, jamais encore une femme n’a osé.
En réalité je n’ai pas cédé, je tiens bon avec la vérité. 1. Parce qu’avec des centaines de massages au compteur (plus de 500 !!!)(!!!!!), je me sens totalement en phase avec ce que je fais. Et avec le recul de la pratique, j’aime désormais trop être masseuse pour perdre du temps à le dissimuler. 2. C’est un super “test à cons”. Mes amies sont prévenues, si un malin me pointe une vague douleur aux lombaires ou aux trapèzes, j’écourte la conversation et m’en vais les prévenir qu'il n’a pas passé le test. Et puis, 3. Le travail a beau être une grande partie de nous et de nos journées (notamment quand on est indépendant.e), il ne nous définit jamais entièrement. Alors, comme souvent, tout va bien.
Au fur et à mesure des rencontres avec mes clientes, une question similaire au tu-fais-quoi-dans-la-vie revient. Une fois allongées sous la grande serviette en éponge, il n’est pas rare qu’elles me demandent si ça fait longtemps que je suis masseuse, ou si j’ai toujours fait ça. Pour elles, c’est sans doute une volonté de me connaître et d’entrer un peu plus dans mon intimité - bien que (ou parce que ?) elles sont déjà à moitié nues dans mon salon. Et pour moi, c’est parfait. Je continue d’apprendre à me raconter aux autres.
Si vous voulez mettre la main sur vos tensions.
La première fois que j’ai reçu un massage Tui Na, on m’a mise en garde à l’accueil du salon : attention, ce ne sont pas des papouilles. Je confirme - les sensations sont intenses (comprenez douloureuses), parce que le ou la praticienne se concentre sur les muscles coincés et tendus. On a l’impression qu’on pince nos tensions et qu’on les fait vibrer comme si elles étaient les fines cordes d’une guitare. C’est impressionnant de justesse et on ressort plein.e d’énergie, le corps profondément relaxé. Je trouve le Tui Na idéal pour compléter une séance d’ostéopathie (distancé de plusieurs jours), pour soulager son corps dans une période où il est particulièrement stressé, ou régulièrement - pour ne pas attendre d’en ressentir le besoin. Dans la médecine chinoise (dont le rituel Tui Na est issu), on recommande un massage tous les 20 jours afin de maintenir un équilibre global du corps et de l’énergie.
Environ 1h00 de massage / entre 70 et 85 euros suivant le lieu.
Où ? J’ai l’impression que la qualité des massages se vaut d’un endroit à un autre. Mais je recommande la Maison du Tui Na (il y en a plusieurs dans Paris) pour le cadre et la version à l’huile, encore plus relaxante.
[le coup de main]
On est plutôt sur un coup de pied pour ce mouvement d’auto-massage. Utilisez un petit rouleau de massage (ou de cuisine ? ou une gourde, un peu d’imagination !) pour masser la plante des pieds. En position assise, ou debout, en mettant son poids sur le pied massé. On roule, du talon au gros orteil, pour gagner en mobilité (un pied est composé de 26 os et d’une centaine de ligaments) et, encore une fois, libérer les tensions qui peuvent se répercuter dans le corps entier. Aussi, c’est une excellente habitude à prendre si vous portez des chaussures à talons.
Merci d’avoir lu jusqu’ici, j’espère que ce deuxième numéro de Vous avez un nouveau massage vous a plu. Vous pouvez répondre à cet email si vous souhaitez me contacter. À très bientôt !