Le jaune des jonquilles illumine les pelouses, les pétales fermes des tulipes peuplent les fleuristes. Le soleil se chamaille avec la pluie. Mes amies rougissent d’amours naissants. J’adore. Je vous l’ai dit la semaine dernière, dans ma nouvelle rubrique « Conseils non-sollicités », ça sent le renouveau.
J’aime particulièrement les transitions qu’offrent les changements de saison. J’ai déjà monologué au sujet de mon goût pour la vie en alternance, et il me semble qu’il s’agit d’un sentiment similaire. Je trouve rassurant le fait d’identifier les différentes périodes qui forment un cycle, de s’y synchroniser. Ce qui me fait m’interroger, puisqu'il existe une myriade de cycles - il suffit d’un événement à la répétition récurrente : le quel préférez-vous ?
Les saisons, le jour et la nuit, l’année, l’année de travail ou scolaire, les vacances, la semaine, les mois, l’arrivée du salaire, la garde partagée des enfants ?
Pour ma part j’adore les rentrées (surtout le grand départ de septembre) mais mon favori reste le rythme des saisons, même si, de plus en plus, mon cycle menstruel devient un guide fort précis.
Ce que je chéris, dans les quatre saisons, c’est d’abord le temps long et les différentes énergies qui viennent avec. Au printemps, les idées et les envies reviennent, le soleil est timide mais on commence à le voir plus souvent, ça monte doucement. En été, c’est l’explosion. Il fait chaud, on vit dehors, jusqu’à tard, les projets (de vacances) deviennent réalité, c’est la haute saison de travail pour moi, et septembre boue encore de bonnes intentions. Ça descend doucement à l’automne, d’un coup l’idée d’un pull est charmante et on a envie de lumière chaude et tamisée, d’intérieur. Le plus périlleux reste l’hiver. Le bas du cycle, le creux de la vague. Il fait froid, on rentre dans son intériorité, au calme. C’est chaleureux, lent et doux mais ce silence invite à la réflexion. Potentiellement intime et intense, ça remue. Parfait pour réunir de la matière afin de se régénérer quand arrivera le printemps. C’est ainsi que je vis l’année. C’est aussi comme ça que j’accueille avec plaisir les petites semaines de travail en hiver (c’est quasiment vrai) et que je trouve l’énergie de masser des dizaines de femmes par mois en été.
Cette année pour la première fois de ma vie, je fais disjoncter l’ordre des choses, j’ai grillé une saison et me suis retrouvée en Guadeloupe. Magie de ressentir une chaleur digne d’un mois d’août après quelques heures de vol - je n’étais jamais allée si loin sur le globe. J’ai eu beaucoup de mal à accepter ce voyage (demandez à mon patient amoureux qui m’a vu changer d’avis 118 fois en deux jours). Pour plein de raisons mais surtout une culpabilité éthique et une peur du changement soudain de planning, aussi connue sous le nom de « peur de perdre le contrôle ». Ce voyage était hors de mon calendrier saisonnier. On peut dire que je fais partie des aoûtiens, je n’ai jamais fait de grandes vacances à un autre moment. Je ne sais pas ce que tout cela veut dire (à part que je travaille peu, oups) mais je continue le délire puisque je vous écris maintenant depuis la ville d’Espagne où, enfant, je passais tous mes étés. Je suis venue rendre visite à ma famille.
Petite justement, j’étais terrifiée par les vagues. Le ressac blanc qui s’écrasait sur le sable était pour moi un monstre dévoreur d’enfant qu’on pouvait chatouiller d’un orteil mais qu’il fallait surtout fuir en hurlant. Ma mère raconte qu’un été, je ne suis rentrée dans l’eau que le dernier jour des vacances. Je ne dirais pas que je suis devenue une grande nageuse depuis. Mais je fais de mon mieux. Avec de l’aide, j’ai surfé la semaine dernière. J’ai bravé les vagues avec la planche comme un radeau de fortune entre les bras et le cœur qui palpitait. J’essaie. Je m’enfonce dans l’eau avec un masque les yeux grands ouverts pour ne plus avoir peur des profondeurs. Je respire doucement avec mon tuba. C’est drôle parce que c’est un terrain que je considère comme hostile, mais dans lequel j’essaie toujours d’être plus à l’aise. Et surtout, c’est un champ lexical que j’emploie sans arrêt en métaphore.
Pour les cycles par exemple. Je vois les saisons comme des bouées profondément ancrées auxquelles on s’accroche pour ne pas subir les vagues et regarder l’horizon, devant et derrière. En haut de celle du printemps, on croit déjà imaginer celle de l’été et c’est par là qu’on va nager.
Je ressens la même sensation à l’échelle du cycle menstruel. Mes recherches à ce sujet sont sans fin, le cycle étant divisé par quatre périodes où l’humeur et les dispositions évoluent et les besoins nutritifs aussi. Ces deux billets du blog de Cécile Doherty-Bigara sont la source à laquelle je me réfère depuis des années. J’ai l’impression d’ouvrir une boîte de Pandore hormonale qui nous concerne toutes mais que nous sommes peu à maîtriser, et même à valoriser : on a souvent évité de s’entendre dire le fameux « elle doit avoir ses règles » lorsqu’on est de mauvais poil et pourtant on parle désormais beaucoup des fameuses SPM (syndrome pré-menstruel) - ce n’est pas pour rien.
À l’image des saisons donc, il y a une période basse, un temps mort, les règles. Et une période haute et joyeuse, un été hormonal, aussi appelé phase folliculaire qui culmine au solstice à l’ovulation. Ensuite, c’est l’automne, les taux hormonaux chutent progressivement (c’est la phase lutéale) et si l’on n’est pas enceinte, rebelote pour les règles et le besoin d’intérieur, de solitude, de calme et une potentielle tristesse ou fragilité. C’est parce que cette période est quelquefois trop éprouvante que je me suis mise à pister mes émotions dans un tableur (je vous l’ai montré ici). Les vagues sont trop hautes, si j’oublie de retenir ma respiration avant qu’elle me traverse, je bois la tasse et panique. Suivre mon cycle me permet d’ancrer au sol des bouées sur lesquelles je peux me reposer sereinement. Le temps passe différemment quand on peut l’anticiper de la sorte. Délimiter autant les périodes me donne l’impression de contenir le temps, de mieux le sentir passer. Quand je relis mon tableur, la précision de chaque phase est comme une image très claire des jours écoulés. À la connaissance et à la normalisation des vagues et de leur creux s’ajoute un curieux suspense à chaque tournant. Chaque cycle peut être différent, plus ou moins long (le mien s’est allongé de 5 jours pour m’épargner de saigner pendant mes vacances, trop sympa). J’ai l’impression de mieux voir, comme avec un masque sous l’eau. J’ai moins peur du temps (mais pas de l’imprévu) et je comprends un petit mieux ce qu’il y a au fond de moi.
À très vite,
Pauline
Ps : ça fait déjà quelques saisons que j’ai mis en place un nouveau rituel pour honorer chaque transition : la promotion du changement de saison. Mon massage Légèreté et sa version XXL passent alors de 130 à 110 euros, et de 160 à 145 euros. Rendez-vous du 19 au 21 sur cette page pour réserver à n’importe quelle date.
Qui suis-je ?
Je m’appelle Pauline Brulez et je suis masseuse depuis trois ans. Mon but est de vous faire découvrir des aspects indiscutés de mon métier mais aussi de vous donner envie de développer le réflexe du massage. Par moi (je pratique et mélange le drainage lymphatique, le deep tissue ainsi que le massage du visage au bâton de Kansa) ou par d’autres - mais en tous cas, régulièrement.
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